Intervention

Pierre Hurmic : Stade Matmut Atlantique

Intervention de

Pierre Hurmic

Vice-Président en charge du Pilotage du projet de transition métropolitain

Conseil du

9 Juillet 2021

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Merci Monsieur le Président, chers collègues, ce n’est pas facile d’intervenir, pour ne rien vous cacher je ne suis pas très à l’aise forcément pour intervenir sur cette délibération qui recèle un certain nombre d’incertitudes et un certain nombre de paris sur l’avenir.

Je pense que si la question qui nous était aujourd’hui posée était la suivante : « Êtes-vous pour ou contre des encouragements à apporter aux dérives du foot-business ? », je pense que l’on serait un certain nombre, j’espère nombreux, à dire « non ». Si la question qui nous était posée, était : « Sommes-nous d’accord pour accorder des réductions de loyer à un nouveau repreneur du Club des Girondins pour l’encourager dans ses premières marches ? », je pense que nous serions un certain nombre également à répondre « non ». Mais je pense que la question qui nous est posée n’est pas celle-là. D’abord, elle est assez technique, mais avant d’aborder les aspects techniques de la question, j’aborderai les aspects peut-être un peu plus généraux. La question qui nous est posée aujourd’hui, c’est « Souhaitons-nous, oui ou non, mettre un terme à la reprise du Club des Girondins par Gérard LOPEZ ? » « Souhaitons-nous, oui ou non, compromettre définitivement son examen de passage devant la DNCG lundi prochain ? » Il est certain que si nous votons contre cette délibération, l’aventure LOPEZ, si je peux la qualifier ainsi, c’est terminé.

Lundi, devant la DNCG, son projet n’est pas accepté puisque la Métropole n’a pas donné son accord concernant les garanties de loyer et on se retrouve avec un club relégué en 3e Division. J’ai entendu Monsieur POUTOU nous dire : « S’il est relégué en 3e Division, en D3, où est le drame ? ». Où est le drame ? Oui c’est un drame, Monsieur POUTOU. Je ne suis pas autorisé à parler au nom des supporters, au nom des aficionados ou des grands amateurs de football, je ne veux pas me faire passer comme tel, mais je considère que pour notre Métropole, pour la Ville de Bordeaux, ne plus avoir un club de football aujourd’hui, c’est une situation qui paraît quand même pour le moins très, très préoccupante.

J’ajoute, comme l’a dit Alain ANZIANI, et pour moi, c’est quand même un argument déterminant, si Monsieur LOPEZ n’est pas choisi, nous n’avons plus de locataire pour le Grand stade. Nous nous retrouvons avec une équipe en 2e ou 3e Division, et nous n’avons plus de locataire. Et notre devoir à tous, notre responsabilité d’élus, c’est aussi d’économiser l’argent public. En signant ce contrat de PPP, nous nous sommes mis dans la nasse. Nous avons des engagements contractuels, Monsieur POUTOU. On a un stade de 43 000 places sur les bras, et nos efforts doivent tendre sur le fait que nous avons intérêt à trouver un locataire qui nous paie un loyer pour alléger la charge de l’argent public. Si ce n’est pas Monsieur LOPEZ qui paie, c’est le contribuable métropolitain qui paiera le loyer du trop Grand stade. M. le Président Alain ANZIANI vous l’a dit, c’est à peu près 10 millions d’euros tous les ans qui nous manqueront, donc qui seront payés par ce même contribuable.

Je considère que la question se pose aussi en ces termes-là et que les contribuables métropolitains pourraient, à juste titre, nous reprocher non seulement d’avoir fait en sorte que l’on n’ait plus de club à Bordeaux en 1re Division alors que l’on a quand même souvent été dans l’élite du football et qu’ensuite, de mettre à la charge supplémentaire du contribuable métropolitain 10 millions d’euros par an, je pense qu’il faut quand même que l’on ait cette donnée en tête.

Répondre négativement à la question qui nous est posée aujourd’hui, on y a réfléchi, honnêtement je me suis dit : « Est-ce que tu ne dois pas voter contre ? » Je me suis dit : « C’est aussi mettre à néant tous les efforts qu’Alain ANZIANI et moi-même déployons depuis plusieurs mois pour éviter précisément que ce club ne soit relégué et ne trouve pas de repreneur. » On a passé du temps à rencontrer tous les repreneurs potentiels en insistant, en prenant contact avec le mandataire ad hoc pour faire valoir les principes et valeurs auxquels nous tenons. Nous avons pris du temps à les recevoir. Nous avons pris du temps pour éviter cette relégation, et moi, je n’ai pas envie aujourd’hui de prendre la responsabilité, de mettre tout à cela à néant. Si nous votions contre cette délibération, je pense que c’est tout cela qui prendrait le dessus, et j’aurais l’impression d’avoir gaspillé beaucoup de mon temps.

Sur le choix du repreneur, Monsieur LOPEZ, personnage, on peut le qualifier comme on veut, moi aussi j’ai lu la presse, c’est la même que Monsieur POUTOU, sans doute, donc, je n’ai pas à faire de commentaire intuitu personae, si ce n’est que c’est évident que moi j’aurais préféré que le repreneur du club soit la Fédération Léo Lagrange. C’est évident que je partage plus de valeur éthique avec la Fédération Léo Lagrange qui n’était pas candidate, je vous le rappelle, qu’avec Monsieur LOPEZ, et j’ai envie de dire la plupart des autres. Mais on n’est pas dans le monde des Bisounours, on n’est pas dans le monde de la fiction, on ne fait pas de la politique hors sol. Les repreneurs sont ceux qui avaient les possibilités financières de reprendre le club. Que ce soit clair, ce n’est pas nous qui avons choisi Monsieur Gérard LOPEZ.

J’en viens maintenant, pour terminer mon intervention, sur la seule question technique, politique, juridique qui nous est aujourd’hui posée, à savoir la question des garanties : « Est-ce que les garanties, aujourd’hui, qui nous sont proposées par Monsieur LOPEZ sont suffisantes ou non ? » « Est-ce qu’elles sont supérieures ou inférieures à celles qui nous avaient été données au mois d’octobre 2018 lorsque beaucoup ont choisi de répondre oui aux garanties qui nous étaient posées à l’époque par Monsieur DAGROSA ? ». Je sais que je suis attendu sur ce terrain-là parce que j’ai sous les yeux le procès-verbal de la séance du Conseil extraordinaire de Bordeaux Métropole du 12 octobre 2018 où j’avais voté résolument contre les garanties qui nous étaient posées. Là aussi, le débat à l’époque était technique. J’avais voté contre les garanties qui étaient posées sur la table par Monsieur DAGROSA et ses associés King Street et Fortress. Certains pourront me dire : « Mais alors pourquoi aujourd’hui, vous ne votez pas contre ? ». Eh bien je considère que le contexte n’est pas le même. Ce n’est pas le même partenaire. Moi, j’avais été frappé, je ne sais pas si c’est votre cas, je parle à ceux qui étaient déjà là au mois d’octobre 2018, par le fait que nous avions en face de nous un Monsieur DAGROSA qui était… on peut le qualifier de bonimenteur, de marchand de bretelles, c’est-à- dire quelqu’un qui s’y connaissait en football autant que moi, autant dire qu’il n’y connaissait rien. C’était un personnage qui représentait un fonds de pension américain, qui venait nous vendre son enthousiasme pour la marque Bordeaux, mais qui ne parlait jamais de football, qui ne parlait jamais de projet sportif, qui ne nous a jamais dit ce qu’il allait faire du club. J’avais été sidéré. Je me suis dit : « On ne peut pas confier les rênes du club de football au représentant d’un fonds de pension américain qui n’y connaît rien, strictement rien en football. »

Cette fois-ci, avec Monsieur LOPEZ, je ne vais pas faire le spécialiste que je ne suis pas, mais j’ai l’impression qu’il s’y connaît un peu plus que Monsieur DAGROSA quand même. C’est un professionnel du football tel qu’on le redoute peut-être, mais c’est un professionnel du football. Donc je considère que les conditions ne sont pas du tout les mêmes.

Alors, la société de Monsieur DAGROSA, on en pense ce qu’on veut, c’est effectivement une SARL (Société à responsabilité limitée) au capital de 20 000 euros. Il y a quand même 7 millions d’actifs, et si on doit récupérer auprès de la société de Monsieur DAGROSA cette garantie de

loyer, mais je vous promets que ce sera plus facile que d’une société de pension américaine qui, certes, gère ou gérait des milliards de dollars, Monsieur DAGROSA en gère moins, mais enfin, au moins il les gère ici, il les gère au Luxembourg. Ce sera plus facile, à mon sens, de les récupérer plutôt qu’auprès de société de fonds de pension américain. Je considère que c’est un plus qui, la dernière fois, n’avait pas été posé comme tel.

Et puis, et je vais terminer là-dessus, Alain ANZIANI l’a évoqué il y a un instant, pour aller au- delà de la garantie de la société de Monsieur DAGROSA, j’étais avec Alain ANZIANI hier quand on a évoqué… pardon ? LOPEZ… qu’est-ce que j’ai dit ? DAGROSA ? Excusez-moi… J’étais avec Alain ANZIANI, hier, quand on a évoqué un nantissement supplémentaire, c’est-à-dire pour aller au-delà même de la garantie de la société de Monsieur LOPEZ, le nantissement des droits TV. On lui a demandé d’ailleurs combien cela représentait. J’ai appris, à cette occasion, que les droits de transmission   TV   pour   la   partie   nationale   en   France, cela   représente 750 millions d’euros pour tous les clubs, et en ce qui concerne les Girondins, à peu près 29 millions d’euros pour la saison prochaine. Alain ANZIANI a demandé à Monsieur LOPEZ s’il était envisageable d’obtenir comme garantie supplémentaire ce nantissement sur les droits de retransmission TV. Il est certain que cela a été demandé hier soir, et que la réponse, on ne va pas l’avoir ce matin. On ne va pas l’avoir avant le passage de lundi devant la DNCG, mais Monsieur LOPEZ nous a assurés qu’il allait faire des efforts et que lui, à titre personnel, n’y semblait pas hostile. Donc, ce sera une garantie supplémentaire. S’il nous l’apporte, ce sera un geste de bonne volonté. S’il ne l’apporte pas, je considère que ce ne sera pas un geste de très bonne volonté de sa part, mais on a cette garantie supplémentaire qui n’existait pas la dernière fois.

Je considère donc, et je termine vraiment là-dessus cette fois-ci, que les conditions, malgré tous les propos que j’ai tenus en préambule, je considère que la situation aujourd’hui doit nous permettre de voter la délibération et de décharger la société King Street de sa lettre d’intention au profit de la société de Monsieur LOPEZ.

Merci.

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